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mercredi 6 novembre 2019

Tirez dans le tas

Tuez-les tous, dieu reconnaîtra les siens. Ce matin, les nouvelles mortifères tombent comme des feuilles mortes.
  • J'étais dès le matin avec les bouquetins du Bargy, déjà décimés ces dernières années (presque 500 sur 700), et une nouvelle fois menacés d'abattage : il fallait donner son avis à la DDT de Haute-Savoie avant demain
  • Et comme il faut toujours une cerise sur le gâteau, la mention de la chasse à courre au renard en Saône-et-Loire comme chaque année après la messe en l'honneur de Saint-Hubert.

Grande Aigrette
On imagine le glorieux équipage aristo (ni bons ni mauvais chasseurs, on parle d'équipage voyez-vous) lançant ses nobles chiens aux trousses du grand méchant renard, dont les torts sont forcément nombreux puisqu'il est quasiment partout classé nuisible ou plutôt SOD, comme on dit après passage à la moulinette de la langue de bois. "Susceptible d'occasionner des dégâts". Ah! la sale bête! Et on est au pays des Lumières, c'est dire s'il est nuisible. Tiens, le voilà qui passe d'ailleurs, au fond en lisière de forêt, un peu trempé et cherchant un petit repas, disparaissant bientôt par l'un de ses bonds dans les roseaux. On entend déjà les éditorialistes dire qu'on doit pouvoir tirer à balles réelles contre pareilles racailles des campagnes.

Dangereux terroriste s'apprêtant à occasionner des dégâts

Les bouquetins, eux, doivent être, désormais, sous la neige. Je ne les verrai pas aujourd'hui. Ceux du Bargy, atteints pour certains de brucellose, sont sur la sellette depuis belle lurette. Par peur pour le reblochon! Qu'il file sa maladie aux troupeaux "domestiques" et qu'on retrouve ça dans le fromage. Un cas un seul et sans preuve aucune qu'un ongulé sauvage ne soit la source de la maladie, mais pan! on dézingue. La préfecture veut désormais en tuer au moins 15 nouveaux, malades ou sains peu importe car les abattages seront non discriminés. La maladie ayant, dans le Bargy, fortement diminué (avec la preuve que les animaux développent une résistance à la maladie), la proportion d'animaux sains est désormais très forte (80%), ce qui revient à dire qu'ils vont abattre 80% d'animaux sains. Mais ce n'est pas grave. 

Bouscarle de Cetti! l'invisible!

Car le sauvage est dangereux, et doit être anéanti. Les vipères souffrent sévèrement de la destruction de leurs habitats, et sont très menacées, mais un projet d'arrêté ministériel prévoit de ne pas les protéger intégralement (elles pourraient être détruites "en cas de danger", ce qui ne veut rien dire). Tout doit disparaître.  

Les bouquetins me font penser aux loups. D'abord parce qu'ils subissent la même logique stupide du Tirez-dans-le-tas. Le loup attaque des troupeaux? on le décime. Les bouquetins risqueraient de transmettre si jamais on ne sait pas mais peut-être que? On les dézingue. Mêmes conséquences absurdes, aussi : les meutes de loups sont désorganisées et les individus esseulés doivent se reporter sur des proies plus faciles que cerfs&compagnie (les moutons sélectionnés par homo sapiens sapiens pour être stupides et incapables de fuir) ; les hardes de bouquetins sont désorganisées, et cela permet à plus d'individus (et donc plus d'individus malades) d'accéder à la reproduction (et vive la propagation). Enfin, dans les deux cas, la question de la protection des troupeaux, c'est-à-dire la question à la portée de l'abruti d'homo sapiens sapiens, est éludée. Les moyens de protection sont connus, efficaces même si relatifs ; mais il n'en est pas question, et on continuera de voir les troupeaux en libre service pour les prédateurs, et en libres divagations dans les alpages aux côtés des ongulés sauvages (ce qui créé les conditions d'une éventuelle transmission de maladie).

Martin-pêcheur d'Europe

On préfère tirer. Pan! C'est plus rigolo il faut dire. Alors de mon point de vue, le Bargy présente le grand avantage de compter une population de gypaètes barbus remarquable, et historique, qui s'y laisse admirer tranquillement. Bon. Les gypaètes ont besoin d'une grande population d'ongulés sauvages, et accessoirement de leurs cadavres dans les avalanches ou autres, pour se nourrir de leurs dépouilles, et ainsi éliminer les risques épidémiologiques (tiens donc). Si on fait disparaître leur source de nourriture, que leur arrivera-t-il?

Mésange à longue queue

Cependant, le renard ne reparaît pas, et je surveille les allées et venues du Martin-pêcheur, ainsi que le cinéma de la Grande Aigrette. Surtout, parmi les petits passereaux passant dans les buissons, j'en vois un qui se prépare à chanter et stupeur : c'est la Bouscarle de Cetti! Ce phénomène que j'entends chanter depuis des mois sans jamais le voir, est enfin venu à portée d'yeux. Photo floue, mais photo quand même. 

Corneille noire, autre terroriste s'apprêtant à occasionner des dégâts

Un autre imbécile d'oiseau se met à crier à tue-tête dans les arbres. Je dis imbécile car on a envie parfois d'appeler les oiseaux par des noms d'oiseaux. Et celui-là est certainement un petit rapace, mais j'ai beau avoir suivi la veille le module sur les vocalisations des petits rapaces, j'en reste sans certitude aucune. Toujours est-il qu'un autre imbécile lui a répondu depuis l'autre bout de l'étang, mais sans décliner plus avant son identité. Un faucon? Un épervier plus probablement? Difficile à dire. Enfin voilà, les oiseaux sont des cons comme disait Chaval, mais on les aime quand même. Alors on essaye de sauver tout le monde en protestant contre les progrès du capitalisme lumineux.

Traquet motteux

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