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vendredi 18 décembre 2020

La démocratie chez les abeilles

2020 n'aura pas été que l'année épouvantable Covid-19 et de son corollaire non indispensable d'une stratégie politique en réponse à cette crise sanitaire nous ayant emmené directement en République d'Absurdistan.


2020 aura également été l'année de l'abeille. Durant le premier confinement, j'ai lu le livre de Morizot dont je tirai la conclusion qu'il fallait trouver l'abeille. L'abeille ayant été par ailleurs trouvée, j'ai lu durant le second (je n'ose dire deuxième) confinement le livre de Thomas D. Seeley, intitulé "La démocratie chez les abeilles" et dont le sous-titre est "Un modèle de société", que l'on peut trouver aux Éditions Quae


Entre temps, une phrase toute bête sur wikipedia avait attiré mon attention : "Les abeilles ont un mode de vie à tendance anarchique d'intelligence collective pour parvenir à un consensus." Je partage plutôt la définition de l'anarchie donnée par Noam Chomsky qui consiste à dire (tant pis si je trahis sa pensée) face à une autorité (généralement auto-proclamée) : "justifie-toi" ; et, dans l'hypothèse (vraisemblable, pour ne pas dire probable) où cette autorité ne parviendrait pas à se justifier, à la renverser. Selon moi toujours, il s'agit également de la définition de la pensée critique, de la science, et de la démocratie. Dure leçon que de constater que les abeilles, Apis mellifera, ces si petits insectes, sont plus scientifiques, critiques, démocratiques et anarchiques que nous, Homo (auto-proclamé, justement) sapiens... Bon. Qu'en est-il vraiment? Ce livre est particulièrement éclairant sur le sujet.


Déjà, c'est un grand livre, un livre exceptionnel. Je n'ai pas souvenir d'en avoir lu des comme ça. L'auteur partage, au milieu de ses exposés scientifiques, de sa joie, du plaisir qu'il prend à s'arracher les cheveux pour les couper en 4. On sent sa passion du début à la fin, passion de faire des sciences, passion des abeilles également. C'est difficile, terriblement difficile, de faire des sciences. L'auteur raconte comment émergent ses hypothèses, comment il doit mettre en place un protocole expérimental pour les vérifier, et à quel point c'est difficile sur le terrain. Mais il aime ça, et c'est extraordinaire. L'auteur raconte également comment sa soif de connaissance du mode de vie des abeilles, et son amour des abeilles, le pousse également à des expériences parfois cruelles (ô combien) pour ces abeilles. Est-ce bien raisonnable et éthique de faire ces choses? Enfin, si ce travail et cette passion lui appartiennent, il ne néglige personne ayant permis de le faire avancer, et il nomme et vante les mérites de tous ses collègues, sans que cela ne soit joué ni feint. La science, c'est le gai savoir sans cesse en construction.

 

Bien. Venons-en au fait. Le problème résolu (au moins en partie) dans ce livre est le suivant : comment un essaim d'abeilles prend-il la décision de s'envoler pour son nouveau logis, en sachant qu'il s'agit d'une décision de vie ou de mort pour l'essaim tout entier? La réponse est stupéfiante : la décision est prise démocratiquement, et est aussi consensuelle qu'efficace.


Résumons. Certaines des butineuses, attirées par les fleurs colorées et ayant bien mangé, deviennent en quelques sortes des expertes de la recherche, et transposent leur expertise en recherche non plus de fleurs colorées mais de gîtes dans une cavité sombre pour y installer l'essaim. Elles deviennent des "éclaireuses". L'essaim suspendu à une branche, en attente d'un gîte, les éclaireuses parcourent des distances faramineuses pour en trouver un qui conviennent. Les éclaireuses ayant trouvé un gîte qui pourrait convenir reviennent à la surface de l'essaim et signalent leur découverte. Le fait qu'elles indiquent la direction et la distance du site par leur "danse frétillante" est assez connu. Qui plus est, elles en indiquent également la qualité, par le nombre de cycles de danse qu'elles font. Les éclaireuses ayant dansé, d'autres éclaireuses à la surface de l'essaim vont inspecter les sites, et, si elles sont convaincues, reviennent également danser les louanges du site en question. Le "miracle" est donc là qu'un petit pourcentage de l'essaim inspecte, fournit des informations à l'essaim et que, à un moment donné, tout l'essaim va partir comme un seul homme, dans une seule et unique direction, qui se trouve être quasiment à chaque fois le meilleur des sites annoncés par les éclaireuses. 

Je ne rentre pas dans les détails, il faut lire le livre. Cependant, certains points soulèvent des questions très importantes de mon point de vue. Par exemple, celui de l'effacement de l'opposition. Une éclaireuse ayant découvert un site qui convient va aller le danser à l'essaim. Elle retournera au site, puis à l'essaim, et ainsi de suite. Cependant, elle va arrêter, et assez rapidement, de danser les louanges du site qu'elle a découvert, qu'il soit de grande qualité ou pas. Conséquence : la promotion de ce site n'est plus assuré que par les éclaireuses qui ont vu sa danse et sont allées elles-mêmes en inspection. Cela permet une vérification de l'information, d'une part, et d'atteindre le plus efficacement possible la décision consensuelle. Il s'agit là d'une différence fondamentale avec notre fonctionnement à nous, et l'autre convoque avec humour Max Planck qui disait : "une nouvelle vérité scientifique ne triomphe point en convaincant ses adversaires, mais plutôt parce qu'ils finissent par mourir ; la nouvelle génération arrive avec le bénéfice de cette connaissance". En effet, les scientifiques (et les êtres humains en général) rechignent à abandonner leurs idées, et les défendent jusqu'à leur mort. Cela retarde l'adoption des idées nouvelles. Les abeilles, elles, abandonnent d'elles-mêmes de défendre leurs positions, et cela très rapidement ; et c'est précisément ce qui les aide à prendre des décisions consensuelles et efficaces. Étonnant, non?


Thomas D. Seeley achève son livre en essayant d'expliquer en quoi les communautés humaines pourraient s'inspirer du processus décisionnel démocratique des abeilles. Il ne s'agit pas, évidemment, d'idéaliser. Simplement de prendre acte que les décisions prises par nos communautés (par exemple en République d'Absurdistan) ne sont pas toujours (voire jamais) consensuelles ni efficaces, et il faut bien explorer des hypothèses pour y remédier. Il l'a, manifestement, pratiqué avec ses collègues, avec succès.

  • avoir un groupe d'individus ayant un respect mutuel et des intérêts en commun. C'est déjà là que le bât blesse dans les communautés humaines : ce n'est pas le cas. Il faut que ça le soit, et cela renvoie aux questions de souveraineté et subsidiarité... à quel niveau doivent être prises les décisions?
  • chercher à ce que le leader n'influence pas la réflexion du groupe. La Reine, bien que condition sine qua non de l'existence de l'essaim, est sans effet aucun dans la prise de décision de l'essaim.
  • chercher des solutions diverses. Il faut beaucoup d'options différentes, et le groupe a là une supériorité évidente sur l'individu, à condition que le groupe admette la diversité des solutions, et n'écarte pas a priori les solutions "minoritaires" ou "farfelues" etc.
  • rassembler les connaissances par un débat, et parvenir à un jugement collectif dénué de pression des pairs 
  • utiliser le quorum pour une décision rapide, précise et solidaire. Atteindre le consensus serait courir le risque de perdre trop de temps pour prendre la décision, et si les points précédents sont respectés, le quorum sera systématiquement pertinent.

 

Parvenir à la prise de décision est un enjeu vital pour l'essaim, et le processus de décision des abeilles a donc été sélectionné par 30 millions d'années d'évolution. Pour notre part, il me semble que nous sommes bien loin de ce niveau de démocratie...

Retour au lac

 Un petit passage, notamment animé par quelques mouettes se disputant de nombreuses miettes de pain qui n'ont rien à faire là... En attendant plus demain peut-être, ou alors en fin d'année et en 2021 


C'est à moi!






lundi 7 décembre 2020

Tout rater

 Quelques photos en retard. Pas très grave, de toute façon, tout était raté. Raté les cincles, même pas pris, et raté même les piafs que j'ai pu photographier malgré tout. Dommage pour la mésange nonnette, pas si fréquent de l'observer, pour l'autour des palombes, non plus, et pour le Busard Saint-Martin (un rapace blanc volant au-dessus de la neige, ça aurait pu me faire)... C'est comme ça :







jeudi 3 décembre 2020

Rémiz penduline en hivernage

 Petit tour du lac Saint-André, ensoleillé ce matin. Dès l'arrivée, observation de Rémiz pendulines, arrivées pour hivernage, comme l'an dernier! Super. Un peu plus loin, Martin-pêcheur, colverts, cormorans, etc. Et un Bruant fou.

Rémiz penduline

Avec un masque noir fort sympathique

Bruant fou

Ca faisait longtemps...

Bec crochu du Grand Cormoran

Colverts

Joli bec