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dimanche 26 mai 2013

Enfin l'Hiver ! Plan de la Limace un 26 mai (Bauges)

C'est toujours émouvant et agréable d'aller profiter des premières neiges de la saison. Après de longs mois d'été et de chaleur, c'est réjouissant de voir le temps et les paysages changer. Oh ! il n'y avait certes pas de neige à Jarsy, point de départ de ma sortie du jour, mais très vite on rencontre les premières traces de chutes récentes... puis... le pays se couvre d'un voile blanc vers 1200m... et à partir de 1500m, il y a bien 15 à 30 cm de neige fraîche. Pas vu ça depuis l'hiver dernier ! 

orchis glacée
Ce qui est étonnant, très étonnant et même stupéfiant, c'est de trouver encore les orchidées, les trolles printanières ayant résisté à tout l'été, tout l'automne, elles tiennent encore debout en ce mois de décembre, pliant mais ne rompant pas sous les premiers flocons... Il se passe de drôles de choses. Toujours est-il que je chemine sur cette large piste me menant aux chalets d'Allant (1588m) et cette piste serait assez rébarbative au printemps alors que l'hiver la rend amusante avec les craquements de la neige sous les pieds et les arbres qui s'éfloconnent.

premières neiges
L'Encerclement encerclé par les nuages

Bon. Trêve de plaisanteries. Nous sommes bien le 26 mai et ce temps qu'il fait devient assez pesant. Il y en a un qui a l'air con, c'est le lagopède... lui qui vient d'abandonner son plumage blanc pour rester dans le ton de son environnement. Les oiseaux sont vraiment des cons. Hélas, il n'y en a pas dans les parages pour pouvoir se moquer d'eux, ils doivent se planquent, verts de rage ou rouge de honte.

C'est toutefois l'occasion de promenades insolites. En temps normal, le Plan des limaces (1722m) est un objectif de randonnée bien modeste. Dans les conditions du jour, elle en devient plus fantaisiste. 



La lumière fait des caprices... soleil éclatant... brouillard impénétrable... d'une ambiance l'autre.... ici un tourbillon de poudreuse... maintenant une averse de neige... et voilà une lumière éblouissante. 



Arrivant à Allant, j'aperçois la Croix d'Allant (1580m) d'où la vue est magnifique. Arrivé aux Chalets, un panneau indique la Croix à 5 minutes. C'était sans compter le brouillard qui tombe alors, n'offrant une visibilité qu'à quelques mètres, et ne permettant qu'à peine de distinguer la neige du brouillard, le sol du ciel... Me voilà errant... je cherche Dieu ! je cherche Dieu ! 
Je cherche Dieu ! je cherche Dieu !
L'insensé - N'avez-vous pas entendu parler de cet homme fou qui, en plein jour, alluma une lanterne et se mit à courir sur la place publique en criant sans cesse : "Je cherche Dieu ! Je cherche Dieu !" - Comme il se trouvait là beaucoup de ceux qui ne croient pas en Dieu, son cri provoqua une grande hilarité. A-t-il donc été perdu ? disait l'un. S'est-il égaré comme un enfant ? demandait l'autre. Ou bien s'est-il caché ? A-t-il peur de nous ? S'est-il embarqué ? A-t-il émigré ? - ainsi criaient et riaient-ils pêle-mêle. Le fou sauta au milieu d'eux et les transperça de son regard. "Où est allé Dieu ? s'écria-t-il, je vais vous le dire ! Nous l'avons tué, - vous et moi ! Nous tous, nous sommes ses assassins ! Mais comment avons-nous fait cela ? Comment avons-nous pu vider la mer ? Qui nous a donné l'éponge pour effacer l'horizon ? Qu'avons-nous fait lorsque nous avons détaché cette terre de la chaîne de son soleil ? Où va-t-elle maintenant ? Où allons-nous ? Loin de tous les soleils ? Ne tombons-nous pas sans cesse ? En avant, en arrière, de côté, de tous les côtés ? Y a-t-il encore un haut et un bas ? N'errons-nous pas comme dans un néant infini ? Le vide ne nous poursuit-il pas de son haleine ? Ne fait-il pas plus froid ? Ne voyez-vous pas venir la nuit, toujours plus de nuit ? Ne faut-il pas allumer les lanternes avant midi ? N'entendons-nous rien encore du bruit des fossoyeurs qui enterrent Dieu ? Ne sentons-nous rien encore de la décomposition divine ? - Les dieux, eux aussi, se décomposent ! Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c'est nous qui l'avons tué ! Comment nous consoler, nous les meurtriers des meurtriers ? Ce que le monde a possédé jusqu'à présent de plus sacré et de plus puissant a perdu son sang sous notre couteau - Qui nous lavera de ce sang ? Avec quelle eau pourrons-nous nous purifier ? Quelles expiations, quels jeux sacrés serons-nous forcés d'inventer ? La grandeur de cet acte n'est-elle pas trop grande pour nous ? Ne sommes-nous pas forcés de devenir nous-mêmes des dieux - ne fût-ce que pour paraître dignes d'eux ? Il n'y eut jamais action plus grandiose, et ceux qui pourront naître après nous appartiendront, à cause de cette action, à une histoire plus haute que ne fut jamais toute cette histoire." - Ici l'insensé se tut et regarda de nouveau ses auditeurs : eux aussi se turent et le dévisagèrent avec étonnement. Enfin, il jeta à terre sa lanterne, en sorte qu'elle se brisa en morceaux et s'éteignit. "Je viens trop tôt, dit-il alors, mon temps n'est pas encore accompli. Cet événement énorme est encore en route, il marche - et n'est pas encore parvenu jusqu'à l'oreille des hommes. Il faut du temps à l'éclair et au tonnerre, il faut du temps à la lumière des astres, il faut du temps aux actions, même lorsqu'elles sont accomplies, pour être vues et entendues. Cet acte-là est encore plus loin d'eux que l'astre le plus éloigné, - et pourtant c'est eux qui l'ont accompli !" - On raconte encore que ce fou aurait pénétré le même jour dans différentes églises et y aurait entonné son Requiem aeternam deo. Expulsé et interrogé, il n'aurait cessé de répondre la même chose : "A quoi servent donc ces églises, si elles ne sont pas les tombes de Dieu ?"
Gai savoir, III, 125

Croix d'Allant

Je retrouve d'yeux la Croix, mais pas la vue. Ce n'est pas le jour. Alors je rampe jusqu'au Plan de la limace. Une superbe poudreuse m'accueille, et l'ambiance devient indescriptible, entre congères subitement éclairées de mille feux, rochers dans le brouillard, silence et solitude absolus.




au Plan de la Limace


dalle
Il me semble pourtant incertain que le temps se lève vraiment. Je vais par-ci par-là, et je songe à redescendre. Quelques traces d'ongulés, mais très légèrement recouvertes de neige... Descente par le bois du replat, pour faire une boucle, dispensable, à ceci près qu'on tombe sur une impressionnante dalle rocheuse. Et c'est le retour au hameau du Coudray (914m) un peu avant 11h, après 14km et environ 900m+. Inutile de préciser que je n'ai rencontré personne la randonnée durant, alors qu'à mon retour, deux groupes s'élançaient, ainsi qu'un couple de parapentistes armé de courage... 





Pique-nique ensuite au pied du Mont Granier, au lac noir, formé par l'effondrement de ce dernier. 

le Lac Noir au pied du Granier
Avant de rentrer sur Lyon...


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